C’est fait. La décision est prise. Le conjoint est d’accord, les dernières appréhensions sont vaincues. Il ne reste qu’un peu de trac, mais pas assez pour reculer. Demain sera le jour de la première expérience naturiste. Oui, sans pour autant en référer à la famille ou aux amis, le maillot de bain restera dans le sac, et c’est intégralement nu que l’on se mêlera à un groupe d’inconnus, entièrement nus eux aussi. Rien à voir avec les vestiaires du club de gym, où la nudité est furtive, et rarement mixte. Ce premier pas en entraînera un autre, et encore d’autres, puisqu’il s’agira, tout simplement, de vivre nu toute la journée.
Pour certains, les premières expériences auront pu avoir lieu au sauna, d’autres ont tenté une fois, en solitaire, de se baigner nu dans une rivière ou un lac, lors d’une randonnée à l’écart du monde. Mais, ce jour là c’est différent. Il faudra certainement parler aux autres, dans la même tenue.
A chaque fois, pour accepter de tenter l’expérience, il faut vaincre trois paliers : accepter de se voir nu, accepter de voir les autres nus, et accepter d’être vu nu par les autres. Les autres ! Quels autres ? Le plus souvent, ce seront des inconnus, Mais si ce n’était pas le cas. Des voisins, par exemple, des collègues de travail, ou même des membres de la famille. Et quels regards vont-ils porter sur nous ? Vont-il nous trouver laids, difformes ? Leur regard va-t-il s’arrêter sur des parties du corps jusqu’ici montrées seulement dans l’intimité, ou chez le médecin ?
Anonymat ou contact direct ?
« …Nous avons très souvent des hôtes qui tentent chez nous leur première fois… » déclarait Lucien Cantin, au gîte des Chênes, un espace naturiste de Bourgogne, aujourd’hui fermé. « …Malgré nos 8 hectares, l’endroit est intimiste. Le gîte et les chambres d’hôtes préservent l’intimité. C’est un peu comme s’ils étaient chez eux, à l’abri des voisins, pour profiter de la piscine ou se promener dans le jardin, sans contraintes… ». Ces primo-naturistes venaient en avant-saison, pour faire un essai avant l’été. Tout comme beaucoup le faisaient à Cap Natur’, en Vendée, jusqu’en 2007, quand le centre était ouvert. Et comme cela peut se passer, notamment, au Domaine du Coq Rouge, en Corrèze, par exemple…lors d’une partie de pétanque.
La première expérience sur une plage n’est pas la plus difficile, surtout sur l’Atlantique ou en Languedoc-Roussillon. Il suffit de se trouver un endroit isolé, et de ne pas mettre le maillot. Mais il en est tout autre quand la décision est prise de tenter des vacances naturistes dans un lieu d’hébergement consacré à cela. En centre de vacances ? Certains choisiront un hébergement dans un grand centre du littoral, tel Euronat (Gironde), pour commencer « en douceur », s’habituant progressivement à vivre nu sur leur terrasse, peu gênés par le regard des voisins. Puis, progressivement, ils se mêleront à la foule, fréquentant la piscine ou le centre commercial. D’autres, plus directs, préfèreront une petite structure plus familiale, en France Verte, venant en camping-car ou choisissant le camping. Histoire de se mettre dans le bain, tout de suite, en fréquentant les sanitaires collectifs, le matin, pour la toilette, ou le midi en discutant avec des habitués en faisant la vaisselle, tel Creuse nature (Creuse). Certains y viendront avec des amis ou de la famille, qui les auront convaincus, alors que d’autres tenteront l’aventure dans le plus complet anonymat. Les anciens ne tarissent pas d’anecdotes à ce sujet. Comme ce couple qui, se sentant libre après avoir marié le dernier, décide de partir pour la première fois en vacances en centre naturiste…et y rencontre leurs enfants, « enfin libérés de la tutelle des parents » ! Que d’occasions manquées…
Chaque choix est unique, chaque circonstance engendre des souvenirs très personnels. Et chaque tentative suscite les mêmes préoccupations, masculines (comment faire pour éviter les érections ?) ou féminines (vont-ils me trouver trop grosse ?) avant de se rendre compte qu’elles n’ont pas lieu d’être. Dans les espaces naturistes, en centre de vacances comme dans les clubs, on rencontrera des jeunes et des vieux, des petits et des grands, des barbus et des imberbes, des grands sportifs et des handicapés physiques, voire des champions handisports ( !), des tatoués et des entièrement rasés. Et même quelques « peoples » qui apprécient les lieux car on ne les ennuie pas. Pas de demandes d’autographes, pas de paparazzi, juste une convivialité partagée dans le plus grand respect.
Quels conseils donner aux primo-débutants ? Certains se posent souvent la question de savoir s’il y a des règles à respecter, des attitudes à adopter, des interdits et des obligations ? Certes, toute collectivité à ses usages, façonnés par le temps. Evitez les gestes provocants, le port systématique du maillot pendant trois jours au nom de « l’habitude progressive », ayez toujours une serviette avec vous pour vous asseoir dessus, ne prenez jamais de photographie des autres, etc. Mais, rien de très exceptionnel, sinon l’application de préceptes fondamentaux du savoir-vivre en société. Ainsi, déclarait en 2015 Alain, alors président du Club naturiste d’Orléans, « …Personnellement, ma première expérience s’est faite facilement, à Port Leucate, sur la plage du quartier naturiste… Comment accueillons-nous les nouveaux ? Le plus simplement possible. En les laissant découvrir, en les conseillant, mais sans les harceler… ».
Les statistiques disent que 95% des personnes qui tentent le naturisme souhaitent y revenir les vacances suivantes. Il y a parfois des chiffres qui valent mieux qu’un long discours…
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