Dans l’édition n°2 de la revue Modes pratiques* parue en janvier 2017, plusieurs contributeurs analysent surtout… l’absence de mode. Un sujet qui ne peut ignorer le naturisme, comme en témoignent notamment dans cet ouvrage collectif les écrits de Sylvain Villaret et Marc Cluet.
« …Tout, en apparence, semble opposer le naturisme et la mode. D’un côté, le retour revendiqué à la nature, à l’authenticité et à la pureté incarnée notamment par la nudité des corps, selon une approche philosophique qui se voudrait a- ou intemporelle, de l’autre, l’artifice, la sophistication, le superficiel consommé à l’échelle du provisoire…», s’interroge Sylvain Villaret (1). Mais, cette opposition ne serait-elle pas qu’apparente, voire factice ou désuète ? « …Car, (continue-t-il), en rester là reviendrait cependant à bien mal connaître tant, sur un versant, ce qu’a été l’évolution du naturisme, que sur l’autre, ce que représente la mode, ce que sont ses usages et ses significations… ».
Ainsi commence sa contribution en 25 pages sur les rapports entre mode et naturisme, du XIXe siècle aux années 1970. Un article fourni, riche en enseignements, qui explore les différentes étapes de l’évolution de la pensée naturiste, cite notamment les frères Durville ou Arnaud Baubérot, autre historien contemporain ayant traité le sujet, et relevant que « …le naturisme oscille en permanence entre ascétisme et hédonisme qui forment dès lors les bornes d’un continuum de pratiques et d’approche qui, toujours, buttent sur les modes ou les épousent… ».
Dans le même ouvrage, et pour une contribution au volume identique, Marc Cluet a choisi de s’attarder sur les pionniers du naturisme allemand, qui, autour de 1900, décrétait que le vêtement est un crime, et prônaient la nudité en tous lieux et toutes circonstances. Et cite Marc-Alain Descamps qui écrivait en 1970 que « …le premier contre-sens à éviter sur les nudistes porte sur la nature même de leur critique et de leur pratique : les nudistes ne sont pas contre les vêtements, ils n’en repoussent pas l’invention et n’en demandent pas l’abolition… », mais en rejettent simplement un usage qu’ils estiment abusif, ou détourné de son sens initial.
Outre ces deux auteurs, l’ouvrage regroupe sous le titre « Sans mode » une trentaine de contributions fournies par des artistes, chercheurs, historiens, qui explorent où se projettent sur un mode sans mode, volontaire ou imposé, comme l’univers particuliers d’une non-voyante, ou des créateurs de l’anti-mode au milieu des années 1970. Une compilation éclectique absolument éclairante sur la perception de la mode, et qui ne peut qu’interpeller ses adeptes…tout autant que ses détracteurs, naturistes ou non.
(1) : Modes Pratiques, revue d’histoire du vêtement et de la mode, publiée par l’école supérieure des arts appliqués Duperré Paris et l’Institut de recherches historiques du septentrion, université de Lille – 450 pages – 15€.
(2) : Sylvain Villaret est chercheur et historien, auteur notamment de « Naturisme et éducation corporelle ».
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