Débuté en janvier en Bretagne, le mouvement « Tousapoilpourlesegur » s’est étendu à 23 départements, et s’organise pour être national. La nudité protestataire, pas seulement sur les réseaux sociaux, désormais acceptée par la loi, est-elle devenue un ultime moyen de se faire entendre, et remarquer ?
En janvier 2021, 19 travailleurs sociaux de l’IME de Plabennec (29) posaient nus, en photo, refusant que leur métier soit écarté du Ségur de la santé, qui prévoyait une augmentation de 183 € net des salaires en milieu hospitalier. Qu’en est-il aujourd’hui ? « Ce mouvement a fait tache d’huile« , ont expliqué ses initiateurs au Télégramme de Brest dans son édition du 27 avril.
Tout est parti d’un groupe de personnes d’un même établissement, l’IMA de Plabennec, réunis sous le nom de « Collectif tous à poil pour le Ségur 29« . Il estimait, et estime toujours, « qu’il y a deux poids deux mesures et une forte inégalité entre le personnel soignant pur et les salariés des établissements médico-éducatifs« . Les premiers ont obtenu une revalorisation salariale, et pas les seconds, qui travaillent au quotidien « auprès de jeunes qui, parfois, ont contracté la covid« . Du personnel aussi exposé au virus que les soignants, mais moins bien protégés. Et souligne Gaëtan qui anime le collectif, « certains jeunes, du fait de leur handicap, ne peuvent pas porter de masque ».
Trois mois après, l’initiative a été reprise dans 23 départements, près de 400 photos ont été produites, montrant du personnel ou des soutiens nus avec des pancartes plus ou moins détaillées, et plus de 2500 personnes sont abonnées à la page Facebook dédiée. « Le logo, qu’on avait dessiné, a été retenu dans d’autres établissements« . Et, précise Le Télégramme, « Le collectif entend aussi trouver, dans chaque département des personnes référentes, pour créer un mouvement national et mieux coordonner les actions à venir« , fort du soutien de nombreux élus (parlementaires, conseillers départementaux et régionaux, des maires).
La nudité protestataire reconnue
Depuis début 2020, avec les mesures sanitaires et les dégâts de la pandémie, nombreux ont été les professionnels, artisans comme libéraux, du public comme du privé, qui ont utilisé la nudité, principalement via les réseaux sociaux, pour alerter sur leur situation. La plus médiatique, et la plus controversée, étant certainement la prestation de Corinne Masiero en mars à la cérémonie des César. Revenant sur ce sujet le 30 avril, la juriste Caroline Mazodier, dans le Figaro, expliquait notamment avec humour qu’il n’y avait pas « exhibition sexuelle » dans ces cas là car « la nudité est parfois tolérée : dans les zones naturistes, par exemple. Mais aussi en matière artistique ou lorsqu’elle s’inscrit dans une démarche de protestation politique. C’est un arrêt de la Cour de cassation du 26 février 2020 qui l’enseigne. A une réserve près : elle ne doit pas porter une trop grande atteinte à d’autres libertés, comme la liberté religieuse. Par exemple, selon les mêmes magistrats dans une autre affaire, pas question d’entrer seins nus dans une église. En l’occurrence, l’actrice se trouvait bien dans un temple, mais uniquement celui du music-hall. Sa démarche était artistique et politique, ce qui la protégeait bien, en tout cas sur le plan juridique« .
Dimanche 9 mai, près de 368 organisations appellent à répondre à l’appel unitaire pour le climat, dans toute la France. Parmi elles, France Nature environnement et la Fédération Française de naturisme. Ainsi que l‘APNEL et l’association FestiNATUR’, ces deux dernières invitant leurs membres à y aller en toute nudité. « FestiNATUR’ ET L’APNEL proposent de se retrouver à partir de 12h place de la République à PARIS. Pour une séance de peinture sur corps (body-painting) : À chacun son personnage pour illustrer notre philosophie dans cette marche pour une vrai loi climat. Venez avec vos pinceaux et peintures spéciales corps, pour une mise en commun et relayez cette info auprès de vos amis et parents« . Et, précise en leur nom Jean-François Feunten, le président de Festinatur’, « Plus personne ne doit être inquiet sur le plan juridique. Autant nous devons nous battre encore et toujours pour faire accepter la « nudité philosophique », autant la « nudité revendicative » en tant que moyen d’expression n’est plus un problème depuis la décision de la Cour de Cass. de février 2020… la relaxe D’Erwan et d’Elise, les deux zadistes de ND des Landes il y à 2 ou 3 ans et notre WNBR de Rennes 2020.«
Entre l’exposition de sa nudité physique pour exprimer une détresse sociale, un « dénuement » face à une situation temporaire ou permanente, et l’affirmation de cette même nudité corporelle comme une source de bien-être, le public aura peut-être du mal à faire la différence entre les deux militances, sur une simple image. Dans une époque ou le visible et le paraître dominent l’existence, l’utilisation de la nudité devient alors tout un art, donc sujet à toutes les interprétations possibles.
Jean-Luc Bouland
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Pour ma part : La nudité utilisé comme moyen revendicateur et provocateur vas à l’encontre de la philosophie naturiste….